8h, on selle les chevaux. Aujourd’hui on doit déplacer deux lots de toros. Il faut échanger leurs enclos en raison du départ de novillos. Le nombre de bêtes par enclos a baissé, on va donc passer les plus nombreux dans le plus grand et inversement. Les 2 clos communiquent entre eux par une porte. Mais…il est difficile de faire comprendre ça aux toros. Mélanger deux groupes constitués c’est la certitude de combats titanesques.On doit donc sortir un premier lot de 8 toros, les laisser dans le chemin qui fera office de salle d’attente, passer les 5 novillos dans le premier clos et ensuite rentrer les toros dans le grand clos. Un plan simple.Pour ce faire, sont mobilisés : 3 cavaliers, 1 vache mansa nommée « la Berenda » et 2 bœufs, « Platon et Socrate ».Le chemin d’accès au cortijo est fermé, la porte qui donne sur la Dehesa aussi, on est en vase clos.La vache et le bœuf sont envoyés dans le premier clos avec l’espoir qu’ils amaillent (se regroupent avec) de suite les toros. Ca coince allègrement, les mansos sortent seuls du clos et vont se réfugier dans un coin. Le mayoral peste : « On aurait dû laisser la vache avec eux dès hier ! ». En effet, après une nuit, les beufs et les braves forment un nouveau groupe, les bœufs connaissant les portes, lorsqu’ils sont poussés par les cavaliers, sortent à la première occasion et créent un effet d’aspiration pour le groupe de toros.Cela se reproduit plusieurs fois, et chacun notre tour, on va les chercher et les re rentrer dans le clos. On essaye par un coté du clos, puis par l’autre, ça merde chaque fois devant la porte, les toros font demi tour, cheval ou non….Dans ce cas de figure, il est conseillé de posséder des chevaux dotés des qualités suivantes. Courage, mais non bêtise ; vitesse, souplesse et bien entendu une obéissance sans faille. En effet, un cheval « bête » ne sentira pas la distance dangereuse, ou s’approchera du toro sans être assez sur ses gardes. Un bon cheval est à même de déclencher lui-même la fuite, en tout cas sans ordre contraire du cavalier. D’autre part, il doit posséder une explosivité nécessaire au départ, être plus rapide une fois lancé qu’un toro au galop, et se « doubler », se plier. Il doit pouvoir effectuer des demis tours rapides afin de recorter un toro trop insistant. En effet, en règle générale, les toros chargent vite et fort, mais sur peu de distance. Toutefois, il arrive que ces grandes lois du campo soient brisées par quelque toro méconnaissant les règles.Quoi qu’il en soit, à Mirandilla, on a pas de cheval qui « rentre », ça prend donc plus de temps. C’est à dire : pas de cheval assez volontaire pour, en rentrant sur le toro avec franchise le faire douter et donc « fuir », mais assez vif pour faire demi-tour en une fraction de seconde en cas de charge. Ici le problème majeur est la franchise. Les chevaux se méfient des toros et rentrent « à reculons », désirant partir… du coup le toro n’y croie pas. Ceci étant, ce n’est en rien un problème.A Mirandilla, ce sont le toros qui dictent la marchent du temps. D’autre part, Fabrice, à le souhait de travailler les bêtes calmement, ne pas trop les brusquer donc, en cas de confrontation trop forte, on rompt. Cela évite les accidents, les clôtures cassées, mais également stresse peu le bétail qui en cas de tri très incisif va s’énerver, uriner et déféquer et ainsi perdre beaucoup de poids et de forces pour rien.Aidé de Javi, venu en renfort avec tracteur et remorque afin de créer un entonnoir devant porte du clos, on reprend le manège. Aller chercher les bœufs, les faire rentrer dans le clos, les amailler au groupe, pousser l’ensemble, toujours en « gueulant comme un vacher » et en faisant le plus de bruit possible. Fabrice a toujours avec lui un gros bâton, sorte de massue faite d’une racine qu’il utilise pour faire du bruit en tapant sur les étrier en fer de sa selle et le lancer en guise de motivateur en direction des toros. Plus petits, s’ils s’approchent trop prés il est possible de les corriger. Ensuite, ils se souviennent…. Ou pas. Chico et moi n’avons rien dans les mains. Passant près d’un chêne j’y arrache une branche. L’effet est immédiat. J’ai bien conscience de l’absurdité de l’objet en cas de charge d’un toro, mais l’effet placebo est là, j’ai moins peur.Ceci étant, bien qu’un peu rassuré, je questionne Fabrice sur la notion de sécurité durant ces faenas de campo. « L’essentiel, est de toujours avoir deux sorties par clos ». Je regarde bien…. Je regarde mieux…. Et ne rencontre qu’une seule issue. « Ha, oui… mais ici il n’y en a qu’une…. » me commente le mayoral sourire aux lèvres.
Au bout d’une heure, ils passent. L’élément fondamental c’est la fatigue… au bout d’un moment ils sont crevés et ils subissent un peu. Le problème, c’est que dans le même temps, en cas de refus, ils démarrent sur le cheval plus tard … donc plus près. En outre, c’est toujours le toro qui a l’initiative de l’attaque. Tout est question de distances, et elles ne s’apprennent qu’à force d’erreurs, et donc de moments de peur. C’est l’école du Campo Bravo.